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La beauté du cinéma

[CET ARTICLE CONTIENT DES SPOILERS]

 

Vendredi soir. Je suis fatiguée, mais je ne peux pas dormir avant d’avoir un peu écrit sur ce grand film [inspiré d'une histoire vraie] auquel je viens d’assister ce soir. Blackkklansman, une œuvre d’art. Spike Lee, un génie. 

 

Je ne sais même pas par où commencer. C’est une foule d’émotions tout au long du film, et ce n’est pas un pot pourri mal foutu, non non : chaque émotion arrive toujours au bon moment et frappe avec force. Humour, suspens, réalisme, ironie, amour, amitié, haine, bêtise, tristesse, joie, légèreté, gravité, violence... tout y passe dans ce film. Et nous passons, nous aussi, spectateurs, dans une tempête émotionnelle délicieuse.

 

J’ai été emportée au point d’oublier mon envie d’aller aux toilettes au bout de la 15eminute.

 

Des acteurs qui jouent juste, des acteurs charismatiques. Des clins d’œil clairs et fréquents aux USA de Donald, qui veut tellement que son pays redevienne « great ». Et un contexte brésilien, vibrant autour de moi, qui résonne trop face à ces discours du KKK que l’on entend dans cette histoire. Ces discours qui font du pays une priorité dans un élan de patriotisme sectaire (l’Amérique avant tout / le Brésil au-dessous de tout, Dieu au-dessus de tous...). Ces discours qui affirment que les noirs, les juifs et les pédés feraient mieux de quitter le pays...

 

Il y a surtout cette scène, longue, construite en opposition, du black power (histoire de mort) contre le white power (scène de baptême). Avec le protagoniste témoin de la scène du KKK mais qui apparaît en fait comme témoin des 2 scènes en même temps, tout comme nous.

Il y a cette souffrance palpable du peuple afro-américain et cette violence incompréhensible du KKK qui s’en amuse. 

 

Il y a ce double personnage qu’est Ron Stallworth. Un personnage à 2 têtes qui représente les opprimés (un combo juif-noir merveilleux). Ces identités qui se superposent et se nient pour faire croire aux intolérants qu’ils peuvent nous tolérer. Ron S. est double dans son investigation, mais il joue aussi double jeu avec sa petite amie, il est partagé entre la lutte et l’ordre, il est double au sein de son travail comme dans sa vie privée. 

 

Et cette scène incroyable où les 2 Ron se retrouvent dans la même salle. Où finalement le faux Ron que les membres du KKK croient être le vrai Ron voit sa réelle identité peu à peu révélée. Lui aussi est double. Et ce dédoublement, cette nouvelle personnalité qu’il épouse lui permet de se retourner sur sa propre histoire, comme s’il se regardait dans un miroir. La réflexion pure. Chapeau à l’acteur qui joue un personnage qui joue un autre personnage. Je ne sais pas comment cela est humainement possible, mais lui, il l’a fait.

 

Et autour de ces personnages aux doubles visages, il y a ces personnalités entières et fixes, intransigeantes, comme des blocs de marbre immuables. Cependant, certains personnages figés ont leur posture justifiée par un passé de souffrances, ils sont comme figés dans la douleur, tandis que les autres ne sont en fait que des caricatures stupides (qui n’en sont pas en réalité car on sait bien que les membres du KKK existent et qu’ils pensent de la sorte), aux arguments si pauvres qu’il nous est impossible d’adhérer à leur pensée et bien sûr à leurs actes.

 

Le double est partout. Comme cette voiture criminelle qui veut faire exploser une personne mais qui en fait se fait exploser elle-même en même temps que la voiture à côté de laquelle elle se trouve parallèlement stationnée... Dans un moment jubilatoire assez unique au cinéma.

 

Je pourrais continuer encore longtemps, mais je crois que je vais me contenter de revoir ce film plusieurs fois dans ma vie.

Il y a de grands moments que le cinéma nous fait vivre, et ils méritent au moins qu'on s'y arrête le temps d'écrire un texte.

Tag(s) : #Arts et culture
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